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Ce que l'Islande a apporté au chien

Sans la ténacité d'un footballeur, le chien aurait bien pu disparaître d'Islande. Ce petit pays au grand cœur et si méritant lors du récent championnat d'Europe de football ne voulait plus de chiens. Au moins le chien a-t-il été banni du pays en 1924 lorsqu'une épidémie d'échinocoque, une maladie parasitaire transmissible à l'espèce humaine, s'est propagée. Les autorités sanitaires ont alors pris la terrible décision d'éliminer tous les chiens de l'île. Pourtant, ils n'étaient pas très nombreux, car déjà vers 1910 une épidémie de maladie de Carré apportée par un chien importé du Royaume-Uni avait décimé un cheptel faible et consanguin qui, du fait de l'insularité du pays, n'était guère protégé des virus. et les bactéries de l'extérieur. Interdire les chiens est une chose, faire respecter l'interdiction en est une autre.

Premièrement, l'interdiction ne pouvait pas s'appliquer aux chiens de berger dispersés dans la campagne ensevelis sous la neige et cachés la nuit la moitié de l'année. Sur cette île située en bordure du cercle polaire, la neige arrive en automne et ne commence à fondre qu'à l'approche de l'été. Le vent souffle tout le temps. Il harcèle la flore qui reste très maigre sur le sol volcanique et mord la faune qui se protège dans une fourrure très épaisse que lui donne l'évolution ou la sélection naturelle.

Sous ces latitudes inhospitalières, les chiens sont bien plus à l'aise que les agents chargés de les chasser pour faire respecter la règle. D'autant plus que ces agents, comme presque tout le monde, aimaient aussi les chiens. Pourtant dans la capitale Reykjavik, qui compte 2/3 de la population, la réglementation était strictement appliquée :les chiens étaient interdits et avaient disparu de la ville. L'interdiction allait durer 30 ans. Et Gudmunsson est arrivé. Est revenu, pour être exact. Toute la gloire et un chien avec lui. En 1953, cet homme extraordinaire revient sur son île pour terminer sa carrière. Albert Gudmunsson, célèbre footballeur, après avoir été repéré au Valur à Reykjavik, avait joué pour les Glasgow Rangers, Arsenal, le Milan A.C., puis le Racing Club de Paris et enfin l'OGC Nice. Au début de la trentaine, il revient dans son pays natal pour une dernière saison à Valur Reykjavik. Il est revenu avec un berger allemand.

Intervention de la police des frontières ou des douanes qui s'opposent à l'entrée du chien sur le territoire. Albert Gudmunsson refuse d'abandonner son berger allemand. Gudmunsson connaît quelqu'un au gouvernement. Début des palabres et négociations, appels à la raison, rappels de la loi. D'accord, d'accord, d'accord. Pour une star du football, le gouvernement accorde enfin une dérogation et Albert Gudmunsson fait un retour triomphal en Islande avec un chien de France. Bien sûr, l'affaire a reçu beaucoup d'attention des médias et, sur la base de l'exemption accordée à la star du football islandais, certains amoureux des chiens ont également demandé le droit de posséder un chien. « Pourquoi lui et pas nous ? » C'est ainsi que la cynophilie est née en Islande. Tout n'a pas été facile ni rapide, mais aujourd'hui, sans être aussi prospère qu'en Europe continentale, cette cynophilie existe. Copiée sur la cynophilie française. On voit peu de chiens , c'est vrai, que ce soit en ville ou à la campagne.

L'importation des chiens reste soumise à une quarantaine sévère pour ne pas dire dissuasive. Il reste que l'exposition annuelle de Reykjavik rassemble chaque année près de 300 chiens. Ce n'est pas si mal pour un pays de 300 000 habitants qui vit sur une île très isolée aux paysages merveilleux, très ouverte aux touristes, mais toujours fermée aux chiens. Il y a en France un chien pour 7 à 8 habitants. En Islande, moins d'un chien pour 100 habitants. C'est sans doute l'une des proportions les plus faibles au monde. On ne voit pas de chiens dans les rues, on ne voit pas non plus de chiens à la campagne. Pas errant, même pas en laisse. Une seule race est d'origine islandaise :le berger islandais, dont, selon les spécialistes, on dénombre à peine plus de 250 chiens de race pure. On les trouve en Norvège, au Royaume-Uni et aux États-Unis.

La première race du pays est, comme presque partout ailleurs dans le monde, le berger allemand. Pour en revenir à la star du football Albert Gudmunsson, il est entré en politique après avoir raccroché les crampons. Député puis ministre, il termine sa carrière comme ambassadeur d'Islande en France de 1989 à 1993. A sa mort en 1994 à l'âge de 71 ans, il reçoit de nombreux hommages du monde du football et de la politique. La France a sorti l'Islande du tournoi de football de l'Euro 2016, mais de façon régulière et sans rancune. Le monde de la cynophilie doit à son tour se rappeler qu'Albert Gudmunsson a bravé l'autorité par amour des chiens. Jean-Yves Réguer